Enregistrements espion : quand la réalité rattrape la fiction !

Dans la quasi-totalité des films d’espions, les agents secrets s’appuient régulièrement sur les gadgets d’enregistrement audio et vidéo pour glaner les informations dont ils ont besoin et porter l’estocade lors du dénouement final ! Parfois on voit également les détectives privés et même les policiers faire usage de stratagèmes identiques afin de mener à bien leurs missions. Le phénomène est tellement bien assimilé qu’aujourd’hui les caméras espions et les autres dispositifs de surveillance discrets se vendent partout sur le web et dans les boutiques spécialisées. Particuliers tout comme professionnels s’en servent pour divers objectifs. Si dans la plupart des cas, ces dispositifs sont parfois utilisés dans un cadre privé, il arrive parfois que ces enregistreurs apportent leur contribution dans des affaires plus sérieuses. Qu’en dit la loi ? Qu’en est-il du respect des libertés individuelles ? Ces enregistrements constituent-ils réellement des éléments de preuves infaillibles dans les affaires judiciaires ? Alors, avant d’acheter votre dispositif d’enregistrement, prenez connaissance de ces quelques points essentiels présentés dans cet article.

Sommaire

Un enregistrement à l’aide d’un micro espion enregistreur pour tout faire basculer

Il est courant de voir au cinéma un retournement de situation grâce à un simple enregistrement. En effet, souvent, les scénaristes aiment bien mettre en avant l’utilité des micros espion enregistreur pour résoudre de manière inattendue une affaire a priori insoluble. En général, le héros de l’histoire arrive à enregistrer les aveux du suspect lors du moment décisif du face à face entre les deux protagonistes à l’aide d’objets inattendus divers : stylo, chargeur espion, mouchard, enregistreurs audio, microphone sans fil espion GSM, Wifi… Si bien qu’à la fin de la confession, notre héros brandit fièrement cette pièce à conviction en signe de victoire. Car dans les scénarios, la possession de cet enregistrement suffit à prouver l’implication du suspect et permet ainsi de mettre fin à l’intrigue.

Parfois, il arrive que notre héros devienne le centre de l’histoire malgré lui en interceptant une conversation privée dans laquelle le méchant expose ses plans. L’intrigue se dessine alors autour de la course poursuite entre le méchant de l’histoire et notre héros. Et le dénouement se produit lorsque la preuve tant convoitée arrive devant le juge et fait tourner définitivement le procès en faveur de l’un des camps en présence.

Si vous envisagez d’acquérir un matériel d’enregistrement espion pour devenir le héros d’une histoire quelque part, sachez que l’usage de tels appareils est soumis à une réglementation stricte.

Enregistrements espion : quand la réalité rattrape la fiction !

La fiction surpasse souvent la réalité

Dans la réalité, si un policier agit tel qu’on le voit dans les films, cela risque d’être assimilé à un vice de procédure. En effet, selon la loi, une preuve audio ou vidéo n’est recevable que sous certaines conditions. Ainsi, la déontologie du métier exige que le policier procède par étapes bien définies avant de pouvoir inclure un aveu audio ou vidéo parmi les preuves du dossier.

De même, pour qu’une pièce à conviction soit recevable devant un tribunal, il faut qu’elle soit obtenue et produite dans les conditions fixées par la loi. Il s’avère donc peu probable d’assister à un retournement de situation à cause d’une vidéo espion produite au dernier moment. Ces cas relèvent donc plus de la fiction pure que de la réalité.

Des lois strictes pour la protection de la vie privée

Une conversation enregistrée dans un cadre privé sans le consentement du ou des protagonistes peut constituer une violation de la vie privée. Plus précisément, selon la loi du 10 juillet 1991, l’écoute et l’enregistrement non autorisés expressément par l’individu concerné peuvent être interdits, et ce, même dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Cet aspect des écoutes formelles représente pourtant un motif légitime au vu des moyens nécessaires à mettre en œuvre dans cette campagne de prévention des actes de terrorisme. La loi est claire : la justification et le nombre des écoutes administratives doivent être régulés par la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement ou CNCTR fondée en 1995 en remplacement du CNCIS. D’autre part, sur le principe des libertés fondamentales énoncées à l’article 12 de la Déclaration universelle des droits de l’homme des Nations unies en 1948, la législation française reconnaît que “Toute personne a droit au respect de sa vie privée”. Ainsi, l’article 9 du Code civil garantit notamment la protection de la vie privée au domicile, le respect du secret professionnel et médical, le respect de l’intimité, la préservation du droit à l’image, etc.

Dans ce cadre légal, les écoutes téléphoniques à caractère judiciaire réalisées au cours d’une enquête sur une infraction, doivent l’être sous le contrôle d’un juge d’instruction. À plus forte raison, une conversation ou une vidéo enregistrée doit non seulement être consentie, mais aussi exécutée en respectant les droits fondamentaux de l’individu pour être légale.

Enregistrements espion : quand la réalité rattrape la fiction !

Qu’en est-il de la recevabilité de ces preuves dans une affaire judiciaire ?

La frontière entre la légitimité de l’acte et l’atteinte à la vie privée s’avère relativement mince dans le cadre judiciaire. Ainsi, le droit pénal reconnaît la validité des preuves récoltées de manière frauduleuse uniquement sous des conditions bien précises. Entre autres, pour qu’une preuve audio et/ou vidéo obtenue à l’insu de la partie adverse soit recevable devant le juge, le plaignant doit prouver que tout a été fait pour préserver les droits fondamentaux des parties adverses. En d’autres termes :

  • Les preuves récoltées (images, vidéo et audio) doivent servir uniquement aux fins du procès en vertu de l’article 427 du Code de procédure pénale statuant que la preuve est libre. En clair, la loi ne fait pas de distinction quant à la nature ni l’origine d’une preuve destinée au tribunal. Toutefois, une diffusion publique constituerait une violation des libertés fondamentales qui risquent d’invalider lesdites preuves.
  • Une conversation enregistrée secrètement est recevable si et seulement si le plaignant participe lui-même à la conversation. Dans le cas contraire, l’enregistrement est non seulement illégal, mais aussi invalidé d’office.
  • L’identité des personnes qui ne sont pas concernées directement par le litige doit être tenue secrète lors de la production des preuves à l’audience (par exemple : photos floutées, voix déformées, etc.).
  • La preuve récoltée doit être claire, audible et concerner directement les faits reprochés à la partie adverse. De plus, par respect du principe de la discussion contradictoire, ces preuves doivent être communiquées au préalable à la partie adverse pour contestation. Les coups de théâtre de dernière minute sont donc exclus.

En somme, la jurisprudence confirme en la décision de la Cour suprême 3585/2016 qu’une preuve à caractère direct demeure recevable malgré la manière illégale de son obtention.

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